Actualité : un arrêt confirme la possibilité d’ouvrir un nouveau redressement judiciaire après résolution de son plan de redressement !

Le 5 mai dernier, nous avons publié un article traitant de la possibilité d’obtenir un nouveau redressement judiciaire, à la suite de la résolution de son plan de redressement. Or, cette solution vient d’être confirmée par un arrêt récent (CA Aix en Provence, 24 mai 2018, n°17/19524), sur lequel il nous est apparu intéressant de revenir.

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1) Rappel de la procédure

En l’espèce, un plan de redressement avait été arrêté par le Tribunal de commerce de DRAGUIGNAN le 24 janvier 2012, au bénéfice de la société VMS DEPANNAGE.

Le 12 novembre 2014, le Commissaire à l’exécution du plan a sollicité la résolution du plan de redressement, et la mise en liquidation judiciaire de la société VMS, en raison du non-paiement des deux premiers dividendes devant revenir à l’un des principaux créanciers de la société, mais sans démontrer si la société était en état de cessation des paiements.

Le 3 février 2015, le Tribunal de commerce de DRAGUIGNAN a fait droit à cette demande, en prononçant la résolution du plan de redressement de la société VMS, et la mise en liquidation judiciaire de la société.

Par un arrêt du 29 octobre 2015 , la Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE a confirmé le jugement sur la résolution du plan, mais l’a infirmé en ce qu’il a prononcé la liquidation judiciaire, dans la mesure où la cessation des paiements du débiteur n’était pas caractérisée, étant relevé, au surplus, qu’au jour du jugement, les comptes bancaires de la société étaient créditeurs, et que la société était à jour de ses obligations fiscales et sociales.

Le 9 août 2016, le Tribunal de commerce de DRAGUIGNAN (T.com Draguignan, 9 août 2016, n°2016004727) a alors décidé d’ouvrir une nouvelle procédure de redressement judiciaire, en fixant la date de cessation des paiements au 29 octobre 2015, compte tenu de la déchéance des délais entraîné par la du plan.

2) Annulation d’une saisie-attribution intervenue après la résolution du plan

En parallèle de cette « saga » judiciaire, pendant le laps de temps écoulé entre la résolution du plan (29 octobre 2015), et l’ouverture du redressement judiciaire (9 août 2016), un créancier opportuniste avait cru pouvoir profiter de la situation, en diligentant une saisie-attribution sur les comptes de la société, afin d’obtenir paiement de sa créance antérieure.

Cette saisie-attribution est annulée par le Tribunal (T.com Draguignan, 26 septembre 2017, n°2017001784) sur le fondement des nullités de la période suspecte (Article L.632-2 du Code de commerce), dans la mesure où ce créancier ne pouvait ignorer que la société était en cessation des paiements depuis la résolution de son plan, du fait de la déchéance subséquente des délais prévus au plan.

Le 24 mai 2018 (CA Aix en Provence, 24 mai 2018, n°17/19524), la Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE a confirmé la décision du Tribunal, en prenant le soin – et c’est le point qui nous intéresse – d’expliciter le sens de sa décision du 29 octobre 2015, dans les termes suivants :

« Il ressort des motifs de cette décision que pour infirmer le prononcé de la liquidation judiciaire, la cour a notamment retenu que selon l’article L626-27 du code de commerce, ce n’est que lorsqu’il constate la cessation des paiements au cours de l’exécution du plan que le tribunal ouvre une procédure de liquidation judiciaire, que la seule inexécution du plan ne déclenche pas par elle-même la liquidation judiciaire, qu’en l’espèce il résultait des pièces versées aux débats que la société VMS dépannage disposait entre janvier et avril 2015 d’environ 80000 € de trésorerie et l’état de cessation des paiements n’était pas avéré.

La cour a donc seulement recherché si un état de cessation des paiements était survenu pendant l’exécution du plan, seule cette circonstance permettant de prononcer la liquidation judiciaire dans la même décision que celle prononçant la résolution du plan, et a répondu par la négative à cette question ».

Cette décision permet ainsi de consacrer la solution selon laquelle, en l’absence de constatation d’un état de cessation des paiements au cours du plan de redressement, le Tribunal ne pourra prononcer la liquidation judiciaire de la société, et pourra, le cas échéant, ouvrir un nouveau redressement judiciaire au bénéfice du débiteur, et ce même par une décision ultérieure à celle prononçant la résolution du plan, comme cela était le cas dans cette affaire

Étienne FEILDEL, Avocat
Bernard RINEAU, Avocat Associé